La Volatilité Boursière, un mal nécessaire

Eric Dadier, Administrateur dela FFCI, Président de l'Institut de l'épargne immobilière et foncière (IEIF)
juin 2006
PHOTO ERIC DADIER

Multiples sont les facteurs, tant ponctuels que structurels, qui contribuent à alimenter la volatilité des cours, un instrument de mesure par ailleurs fort utile de l'incertitude entourant la valorisation des actifs boursiers.


Souhaitable ou indésirable ? La volatilité des cours de Bourse fait l'objet de critiques virulentes toujours suivies de rapports savants chaque fois qu'elle augmente au-delà des normes habituelles, notamment en période de crise. Lorsqu'elle est basse, personne n'en parle, sinon en regrettant qu'elle ne soit pas plus élevée. Comme les maisons de courtage, les opérateurs qui interviennent fréquemment sur le marché peuvent difficilement s'en passer et ne se sentent guère à l'aise quand les séances sont rendues ennuyeuses par la modestie des variations de cours. Inutile, toutefois, de rêver à un juste milieu : la volatilité n'est pas une matière maîtrisable par un quelconque renforcement de la réglementation tant les facteurs ponctuels et structurels qui contribuent à son augmentation sont nombreux et variés. Elle dépend de l'humeur, elle-même changeante, du marché dont le comportement cyclothymique est bien connu en fonction de l'évolution de l'environnement et du flot ininterrompu d'informations. Elle est aussi alimentée par l'hétérogénéité et l'instabilité des anticipations qui figurent parmi les aléas permanents de la Bourse. Si elle s'élève, c'est que, entre autres, la fiabilité des prévisions de résultats laisse de plus en plus à désirer, soit parce que les analystes ont des opinions très discordantes sur une même entreprise, soit parce que l'entreprise en question a du mal à se faire comprendre du marché. Ce dont souffre en particulier Thomson depuis de longs mois. Une valeur livrée à la spéculation, évoluant au gré des rumeurs sur un probable rachat du groupe par des fonds d'investissement.


Renault, un cas d'école :

Les poussées de volatilité peuvent être à la fois violentes et brèves comme ce fut le cas le jour des attentats de Londres en juillet 2005, une séance marquée par une brusque dégringolade suivie d'une remontée spectaculaire des cours. Plus récemment, le 9 février dernier, la présentation du plan stratégique de Carlos Ghosn avait provoqué de gros remous, en quelques heures, sur le titre Renault, d'abord en forte baisse jusqu'à 71,90 euros avant de conclure la journée à 76,40 euros, en progression de 1 % par rapport à son niveau de clôture de la veille. La première réaction à chaud du marché avait été de sanctionner durement l'annonce d'un nouveau tassement à 2,5 % de la marge opérationnelle du groupe attendue pour 2006. Mais les acheteurs étaient ensuite revenus en force en retenant que l'objectif du nouveau patron de Renault était de porter cette marge à 6 % en 2009.Un bel exemple d'empoignade passagère qui, en très peu de temps, aura fait des heureux, mais aussi des malheureux, notamment ceux qui ont eu le mauvais réflexe de vendre dans la précipitation.

Incontrôlable, la volatilité est, malgré tout, un instrument de mesure fort utile de l'incertitude entourant la valorisation des actifs boursiers. Définie comme l'écart-type des variations de cours sur une période assez brève (de un à six mois), elle est dite historique lorsqu'elle évalue la dispersion des variations passées autour de la moyenne des cours. Elle est dite implicite avec une plus grande capacité prédictive quand elle est calculée à partir du cours des options. Car elle porte alors sur le futur. Dans l'un et l'autre cas, la volatilité prend en compte symétriquement les gains et les pertes, passés ou anticipés. Autrement dit, l'écart-type ne prétend pas indiquer une orientation précise, à la hausse ou à la baisse, mais le degré de réactivité d'une valeur. Le débat sur la volatilité n'a donc guère de sens, sinon sur le plan purement technique et entre experts. Et pourtant, il resurgit publiquement à chaque crise prolongée, lorsque les perdants sont beaucoup plus nombreux que les gagnants. Pour se donner bonne conscience auprès des victimes des nuisances de la volatilité, les autorités de marché se penchent sur les multiples causes de ce qui est alors considéré comme un mal à combattre. Parmi les principaux accusés, les innovations incessantes en matière d'ingénierie financière, la prolifération des produits dérivés, les programmes informatisés de trading, les prêts de titres dont les ventes à découvert sont l'une des composantes, les hedgefunds... Tout est passé en revue, examiné à la loupe. Et pourtant, jamais les autorités de tutelle n'ont osé remettre en cause le développement des nouveaux marchés et des nouvelles techniques financières. De peur, sans doute, de faire pire que mieux par excès de réglementation. La volatilité a toujours fait partie intégrante des marchés financiers. Il faut continuer à vivre avec.

 Graphique Renault
GRAPHIQUE RENAULT